Scientific MOOCs follower. Author of Airpocalypse, a techno-medical thriller (Out Summer 2017)


Welcome to the digital era of biology (and to this modest blog I started in early 2005).

To cure many diseases, like cancer or cystic fibrosis, we will need to target genes (mutations, for ex.), not organs! I am convinced that the future of replacement medicine (organ transplant) is genomics (the science of the human genome). In 10 years we will be replacing (modifying) genes; not organs!


Anticipating the $100 genome era and the P4™ medicine revolution. P4 Medicine (Predictive, Personalized, Preventive, & Participatory): Catalyzing a Revolution from Reactive to Proactive Medicine.


I am an early adopter of scientific MOOCs. I've earned myself four MIT digital diplomas: 7.00x, 7.28x1, 7.28.x2 and 7QBWx. Instructor of 7.00x: Eric Lander PhD.

Upcoming books: Airpocalypse, a medical thriller (action taking place in Beijing) 2017; Jesus CRISPR Superstar, a sci-fi -- French title: La Passion du CRISPR (2018).

I love Genomics. Would you rather donate your data, or... your vital organs? Imagine all the people sharing their data...

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Mission d’évaluation de la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005

Une réticence du corps médical à répondre aux demandes des patients en fin de vie voulant éviter la souffrance ?

C'est la question qui est au coeur de la mission d'évaluation de la la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, dite loi sur la fin de vie ou loi Léonetti. Cette loi porte le nom de son auteur, médecin et député : Jean Léonetti. Cette mission d'évaluation, qui a débuté au printemps 2008, vient de se terminer (à la mi-octobre 2008). D'après Jean Léonetti, il subsiste des résistances de la part du corps médical lorsqu'il s'agit de répondre aux questions sur la souffrance que posent et se posent les patients en fin de vie. Le Professeur Louis Puybasset, chef du service d'anesthésie-réanimation de l'hôpital de la Pitié Salpêtrière, Paris, semble en désaccord, puisqu'il pense de son côté qu'il n'existe pas vraiment de réticence de la part du corps médical face à ces questions :
"La médecine a toujours été là pour soulager les souffrances. C'est là son rôle premier."

En tant qu’usager de la santé et auteur du weblog d’information "Ethique et transplantation d’organes", j’ai suivi avec attention et grand intérêt l’audition du 8/10/2008 du Professeur Louis Puybasset, chef du service d'anesthésie-réanimation de l'hôpital de la Pitié Salpêtrière, Paris, dans le cadre de la mission d’évaluation de la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, dite loi sur la fin de vie, et ai pu apprécier la rigueur et la dimension humaine de son exposé. Les auditions dans le cadre de la mission d'évaluation de cette loi sont retranscrites en différé sur le site internet de l'Assemblée Nationale, et peuvent donc être visionnées par tous (lien).


J’ai bien compris la nécessité de "sécuriser les affaires de sédation" dont parle le Professeur Puybasset. Rappelons que la "sédation", ou "sédation terminale", est l'anesthésie visant à prévenir ou à corriger la souffrance de malades en fin de vie.

Le Député et Docteur Jean Léonetti, auteur de la "loi sur la fin de vie" d'avril 2005, a posé au Professeur Puybasset la question suivante :
"Un malade qui en fin de vie réclamerait une sédation, est-ce que c’est quelque chose qui vous apparaît comme choquant ? Quelqu’un qui sait qu’il va mourir dans les jours ou les heures qui vont venir et qui réclame d’aborder la mort avec une sédation, en étant endormi, est-ce que ça vous parait quelque chose d’acceptable ?"

A cette question, le Professeur Puybasset a répondu :
"Si on rentre là-dedans, je ne vois plus très bien où est la frontière avec l’euthanasie. (...) Si c’est dans le cas du malade conscient, on tombe dans une sorte d’euthanasie à la française, qui ne dirait pas son nom, et qui pourrait aller jusqu’à ouvrir un 'droit à la mort opposable', mais il ne s’agit plus là d’une logique médicale. (...) Avec la médecine, on est dans des questions de devoir et pas de pouvoir." D’après le Professeur Puybasset, il faut éviter "l’escalade 'euthanasie-prélèvement d’organes'", visible aux USA et aux Pays-Bas.

En tant que grand public, je réfléchis sur le thème "douleur et prélèvement d’organes". Il me semble que le choix se pose à peu près en ces termes : que préférez-vous ?

- (option 1) Qu’on dise à vos proches que vous êtes "mort" afin de pouvoir prélever vos organes ("règle du donneur mort") ? Oubliez alors la question de la douleur lors du prélèvement de vos organes : elle n’est pas pertinente. De toute façon, un donneur d’organes "mort" n’est pas anesthésié en continu. Oubliez alors le fait que les équipes médicales doivent réanimer des patients avant le prélèvement d’organes. Que cette réanimation est douloureuse (aussi) pour les équipes médicales qui en ont la charge. Réanimé ou pas, vous êtes mort et un mort, ça n’a mal nulle part. Bannissez toute tentative d’une représentation réaliste du prélèvement de vos organes à votre décès (conseil d’ami donné par une infirmière coordinatrice des transplantations : "Il ne faut pas imaginer le prélèvement d’organes") et ne pensez qu’à une chose : vous êtes généreux. (Orientation française)

- (option 2) Que de votre vivant, ayant réfléchi à votre fin de vie, vous puissiez envisager de donner vos organes et tissus encore viables si la fin des traitements palliatifs était envisagée tandis qu’il serait malheureusement devenu inutile de poursuivre des soins ? La question de la sédation terminale serait alors envisagée au préalable du prélèvement d’organes. Le problème de la douleur (anesthésie, sédation terminale) ne serait pas balayé sous le tapis. Une personne en fin de vie a droit à une sédation. La "règle du donneur mort" est reconnue comme hypocrite, au minimum elle est largement battue en brèche car reconnue comme étant "une voie sans issue", ce qui permet justement de ne pas évincer la question de la sédation de fin de vie (Orientation américaine).

Où est-on plus généreux ? Dans le choix (1) ou dans le choix (2) ?

Désolée, mais en fait vous n’avez pas le choix. (2) n’est pas une option en France. La loi Léonetti, dite loi sur la fin de vie, datant d’avril 2005, concerne donc les soins palliatifs dont devraient bénéficier tous les patients en fin de vie – à l’exception des donneurs d’organes, dits "morts", qui n’ont plus les droits civiques de la personne en fin de vie. Prélever un mourant ou reconnaître que l’on prélève un mourant équivaut à un crime puisqu’en France la "règle du donneur mort" a force de loi. Pour l’usager de la santé, l’absence de consensus au niveau international (la coexistence de ces deux options "opposées") est très troublante. L’individu est moins responsabilisé en France qu’aux USA : il n’a pas à réfléchir à la question "douleur et don d’organes". Le discours public français demande bien le consentement de l’usager de la santé au prélèvement de ses organes après son décès. La "règle du donneur mort", à mon sens, ne permet pas le don d’organes. Les usagers de la santé ignorent que les médecins peuvent déclarer mort un patient "à cœur battant", ayant été réanimé aux "seules" fins de conserver les organes, que cette réanimation est bien sûr invasive. Dans ce cas, le consentement éclairé, pourtant inscrit dans la loi, ne signifie pas grand-chose.

==> Voir l'article de fin août 2008 : La "règle du donneur mort", une voie sans issue ? (lire).

La question que je me pose, uniquement du point de vue de la douleur : ai-je plus de "chances" de souffrir si on me prélève mes organes en fin de vie en France (option 1) ou aux USA (option 2) ?

Très sincèrement, l’option française ne m’inspire pas confiance. Je ne peux me défaire de l’impression qu’il s’agit plus d’un vol que d’un don (le consentement éclairé n’est pas possible avec la "règle du donneur mort"). Je m’interroge donc sur le don d’organes suite à une décision d’arrêt des soins dans un contexte de fin de vie - suite à arrêt des soins palliatifs (situation USA). Dans cette situation, je m’interroge pour savoir si j’autoriserais le don de mes organes à ma mort. Je m’interroge sur la question de savoir comment, concrètement, se passerait une fin de vie où la personne veut faire un don d’organes ? A mon sens, l’exercice de la médecine comme "devoir" et non comme "pouvoir" ne doit pas censurer les questions liant le don d’organes en fin de vie et les soins palliatifs, dont le but est d’alléger les souffrances de fin de vie (l’accompagnement lors de la fin de vie, jusqu’à la mort, afin d’éviter les souffrances). La "règle du donneur mort" relève à mon sens de la médecine comme "pouvoir" et non comme "devoir", car elle censure la question de la douleur (un mort, cela n’a mal nulle part).

Les Etats généraux de la bioéthique auront lieu au premier semestre 2009, je souhaiterais que la question "douleur et prélèvement d’organes" soit prise en compte lors de ces Etats Généraux, auxquels je souhaiterais participer en tant qu’usager de la santé.

Pour conclure sur une note optimiste, je laisserai la parole au Professeur Bernard Debré, qui plaide en faveur de la recherche sur les cellules souches (clonage thérapeutique) :
"En dehors d'une poignée d'illuminés, vite repérés, et dont on peut penser qu'ils seraient punis comme ils le méritent, qui donc aurait intérêt à transformer le clonage en activité criminelle ? A tant faire agiter des fantasmes, certains se rendent-ils compte qu'ils travaillent au discrédit de la recherche? Criminaliser, en plein XXIème siècle, les recherches sur le clonage thérapeutique m'apparaît aussi stupide que de s'opposer, au début du XXème siècle, à la généralisation du vaccin. D'abord parce que, sans recherche sur l'embryon, je ne le répéterai jamais assez, nous ne serons pas en mesure, demain, de maîtriser l'autoreproduction de nos propres cellules souches ; ensuite parce qu'il est contradictoire, et pour tout dire malhonnête, de favoriser le don d'organes et d'interdire à ceux qui en auraient le plus besoin de recourir au gisement cellulaire que constituent des centaines de milliers d'embryons surnuméraires congelés.
Que faut-il, aujourd'hui, pour sauver, par une greffe, la vie d'un malade dont le foie ou les reins sont gravement atteints ? Rien de plus qu'un donneur, autrement dit, parfois... l'impossible. Attendre la mort d'un jeune homme ou d'une jeune femme dans la force de l'âge et dont l'organe sera compatible avec son organisme : voilà le quotidien de milliers de malades dont beaucoup savent qu'ils disparaîtront sans avoir eu la chance de profiter de la malchance d'un autre. Cet autre dont le corps n'avait plus d'avenir sur cette terre, hors celui de sauver la vie d'un inconnu...
Regardons maintenant ce qui se passe pour les embryons congelés. N'ayant pas été utilisés pour assurer une descendance aux couples dont ils sont issus, ils sont près de cent mille par an à s'entasser dans les congélateurs de nos laboratoires et de nos instituts de recherche. Sans doute cette image choquera-t-elle certains, mais elle correspond à une réalité : ces petits d'hommes en puissance n'ont pas plus d'avenir sur terre que de sauver les accidentés de la circulation auxquels on prélèvera un rein, un coeur, ou un foie. Et pourtant de nombreux pays interdisent qu'on les utilise pour la recherche médicale, fût-ce, à très court terme, pour sauver des vies... En France, les dérogations sont possibles et une réforme est envisagée, comme on l'a dit, mais pas encore adoptée, loin s'en faut." "Dictionnaire amoureux de la médecine", paru aux Editions Plon, septembre 2008. [L'extrait cité se trouve p. 447-448]. Copyright Plon 2008.


En reconnaissant la nécessité de "(...) sauver les accidentés de la circulation auxquels on prélèvera un rein, un cœur, ou un foie", le Professeur Bernard Debré compromet-il la nécessité de "sécuriser les affaires de sédation" ? Il me semble que la reconnaissance de cette nécessité de "sauver" les donneurs d’organes correspond à la conception de "l’exercice d’une médecine de devoir et non de pouvoir" dont parlait le Professeur Puybasset. Il me semble urgent de sortir du dogme de la "générosité", dogme avec lequel on jongle pour justifier les prélèvements d’organes. Les Américains l’ont dit, ce dogme, dérivé de la règle du "donneur mort", est inopérant. Une "voie sans issue".
"Un malade qui en fin de vie réclamerait une sédation, est-ce que c’est quelque chose qui vous apparaît comme choquant ? Quelqu’un qui sait qu’il va mourir dans les jours ou les heures qui vont venir et qui réclame d’aborder la mort avec une sédation, en étant endormi, est-ce que ça vous parait quelque chose d’acceptable ?"

Cela ne me paraît pas choquant, cela me paraît même être un droit, dans le cadre de la réflexion "douleur et prélèvement d’organes". Si j’ai bien compris, afin de ne pas transformer ce droit en un "droit à la mort opposable" qui serait, lui, tout à fait abusif, il me faut renoncer à ce droit, qualifié par le Professeur Puybasset d’"escalade euthanasie-prélèvement", et me résigner, juste dans le cas du donneur d’organes "mort", à ce que la "médecine de devoir" soit évincée au profit de la "médecine de pouvoir" ? Je sens bien que cela est injuste.

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